Par
Carine Jaggi
Dring, vous venez d’acheter votre journal sur internet.
Rien de plus simple : vous avez composé sur votre téléphone portable le
numéro affiché sur une page web, et reçu par SMS surtaxé un code qui permet
de consulter l’article en ligne. Quelques centimes seront débités
directement sur votre facture téléphonique. L’appel étant identifié par
votre numéro de téléphone, personne ne peut passer commande pour vous sans
avoir votre appareil entre les mains. La méthode est simple, instantanée,
imparable. Une petite révolution dans le monde de l’internet, qui a toujours
buté sur le problème des micro-paiements.
Pour les sites de contenu, en panne de revenus
publicitaires, c’est une véritable aubaine. « Le visiteur n’a pas
besoin de s’inscrire, d’entrer un mot de passe ou un numéro de carte de crédit,
explique Gaël Hurlimann, responsable internet au journal Le Temps, le débit
est immédiat et le service accessible en quelques secondes ». D’ici la
fin de l’année, une partie des articles du quotidien seront vendus à
l’unité au moyen du téléphone portable. Autre avantage du système, le
client devrait payer sans broncher la facture, de peur d’être privé de téléphone.
L’heure du payant a sonné
Depuis mai dernier, le site français Sport.fr mise sur la
facture téléphonique pour vendre à la pièce ses articles payants. Une
nouvelle source de revenu qui constitue déjà 30% de son chiffre d’affaires,
contre 20% aux abonnements payés par chèque et 50% à la publicité. L’éditeur
a pris soin de ne pas se couper des moteurs de recherche : « Chaque
article payant est référencé individuellement sur Google, grâce à un résumé
et des mots-clés », explique David Tomaszek, directeur de Sport.fr. Sur
mille personnes qui accèdent à la présentation de l’article, cinq l’achètent
par téléphone.
La société genevoise Echovox, qui a signé des accords
avec les différents opérateurs suisses, compte déployer son système de
paiement par SMS sur une quarantaine de sites d’ici 2003. Principal frein, la
commission de 50% des opérateurs téléphoniques sur les SMS surtaxés, à
comparer aux 2-3% retenus par les organismes de cartes de crédit. Pour
augmenter la marge des éditeurs, Echovox combine l’envoi du SMS avec un
appel de type 0900, dont 90% de la taxe est reversée aux éditeurs. « Les
marges devraient évoluer en raison de cette cannibalisation entre SMS et
appels surtaxés, estime David Marcus, CEO d’Echovox, dans les pays
nordiques, la part revenant aux opérateurs sur les SMS surtaxés ne dépasse
pas 20 à 30% ».
Le porte-monnaie mobile inquiète
Prudence du côté des opérateurs suisses, qui ont fixé
un tarif maximum de 3 francs pour les SMS surtaxés. « Le client n’est pas
toujours conscient du montant qu’il paie en utilisant ce genre de services,
précise Reto Wittwer, manager third party services chez Orange, d’autre
part, il nous est impossible de savoir si la prestation payée a bien été délivrée ».
Une information exclusive vaut bien quelques centimes, mais
il est illusoire de penser que les internautes vont tapoter sur leur portable
à chaque page vue. Ce système, particulièrement adapté aux achats isolés,
restera donc l’un des nombreux moyens de paiement disponibles. Les journaux
en ligne continueront d’être lus par abonnement, sans compter les articles
gratuits utilisés comme produit d’appel pour la constitution d’une
audience rémunérée par la publicité.
Quant aux internautes qui préfèrent confier à un site
web leur numéro de portable plutôt que celui de leur carte de crédit, ils
risquent de déchanter rapidement, le temps d’être assaillis de SMS
publicitaires en tout genre. Si la carte de crédit est chose précieuse, le
mobile reste un objet intime qui ne sonne pas forcément comme un
tiroir-caisse. C’est au prix de cette compréhension que se joue l’avenir
des micro-paiements par SMS.
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