Sport électronique: tous au tapis
1'500 athlètes d’un nouveau
genre s’affrontent ce week-end à l’open de jeux vidéos de Martigny.
Carine Jaggi a suivi la préparation d’un équipe neuchâteloise.
Play
« Magnifique action des terroristes qui
viennent de poser leur bombe et mènent par 4-0 ! » clament les commentateurs
de la finale mondiale du jeu de
guerre « Counter-Strike », diffusée sur internet. Derrière son écran,
Charles Monnerat suit la retransmission et analyse la tactique des champions du
monde suédois. Dans quelques jours à Martigny, son équipe affrontera l’élite
européenne lors de la plus grande compétition de jeux vidéos jamais organisée
en Suisse.
Trois heures d’entraînement par jour
18h. L’équipe des « Natic » se retrouve dans un cybercafé de
Neuchâtel. A 20 ans, ces cinq étudiants en informatique s’entraînent trois
à quatre heures par jour. Dans leur sac de sport, ils ont tous amené leur
propre équipement. « Une souris optique et un tapis en verre pour assurer un
maximum de précision » explique Shirui Tang alias Gally. Les as du clavier
passent d’abord au briefing tactique. En sa qualité de capitaine, Charles
Monnerat alias Zetord récapitule les schémas de jeu et les positions de
chaque joueur. « Gally surveille le pont et Skail les arcades. Quand Polux
saute, les deux autres remontent l’escalier et lancent leurs grenades ».
Enfants de la balle
Au lieu de courir derrière un ballon, les équipes de « Counter-Strike »
s’entretuent pour faire exploser une bombe. A ce détail près, les joueurs
neuchâtelois estiment pratiquer un sport comme un autre et refusent qu’on y
associe systématiquement la violence. « Que ce soit avec une raquette de
tennis ou avec une arme virtuelle, le but est le même : mettre en échec un
adversaire en déployant des stratégies, tient à préciser Manouk Der Stépanian
alias Skail, tout cela reste virtuel ». L’entraînement se poursuit par deux
matches de 60 minutes. Equipés de casques et de micros, très concentrés, les
cinq joueurs s’acharnent frénétiquement sur leur clavier tout en signalant
les positions ennemies à leurs coéquipiers.
Equipes de nuit
L’entraînement se prolonge à domicile. Sur internet, les matches se jouent
en équipes virtuelles dispersées aux quatre coins du monde. 22h. Zetord vient
de constituer une équipe avec des joueurs français et anglais. Derrière son
micro, il donne ses instructions sur fond de mitraille. Les parties s’enchaînent
à toute heure du jour ou de la nuit. « Les bons joueurs américains se
connectent vers 2-3h du matin pour nous » explique Zetord. Les meilleures
rencontres sont retransmises sur internet en direct ou en différé. Il est même
possible aux supporters virtuels d’y assister en se mettant dans la peau de
leur joueur fétiche.
Dopage informatique
Firmes informatiques et fabricants d’électronique se pressent au portillon
pour sponsoriser la diffusion sur internet de ces exploits sportifs d’un
nouveau genre. Les géants de l’informatique ébauchent sous la table les
premières ligues professionnelles, flairant le bon filon d’un sport ultra
populaire et presque propre. « Nous avons aussi notre forme de dopage,
explique Christian Wagner d'Interever, l’un des organisateurs du tournoi de Martigny. Ce sont des programmes informatiques
qui permettent de tricher ou d’améliorer ses performances. C’est pourquoi
les compétitions officielles se déroulent en réseau local avec des joueurs
physiquement présents. Tous les ordinateurs sont contrôlés ». Une fois passé
le contrôle anti-dopage, les 1500 sportifs électroniques s’affronteront
durant trois jours à Martigny. Les organisateurs ont même engagé les
meilleurs commentateurs français pour enflammer le public lors des finales jouées
sur écran géant. Adieu les consoles de salon, le jeu vidéo prend le chemin
les stades.
Carine Jaggi pour L'Hebdo
et la TSR
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