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Retour au menu Reportage TSR Nouvo du 06.05.04
Les Suisses qui font Google
 
Google, c'est un Club Med géant pour premiers de classe. Ce sera aussi l'une des plus grosses entrées en bourse de l'histoire. Rencontre à Silicon Valley avec les Suisses de Google.  Play 
 
 

Au pays de Google, le visiteur est accueilli par une alignée de «Lava lamp», ces luminaires-tubes remplis de grosses bulles multicolores. C'est le symbole officiel de la société. Plus loin, un écran affiche en temps réel les recherches traitées par le moteur de recherche. Visite éclair dans le cerveau de millions d'inconnus : «crise cardiaque», «Britney Spears», «manga». En tout 300 millions de demandes par jour.

Le monde merveilleux de Google

Google, c'est une culture à part, exhumée du bon vieux temps de la bulle internet. Les chercheurs y sont chouchoutés : repas gratuits préparés par l'ex-chef des Grateful Dead (suivre le pavillon pirate levé sur le bâtiment de la cafétéria), massages, cabinet médical, bar à jus de fruits, canapés de travail, lavomat.

Hommes de goo

«Don't be evil» est le slogan des deux fondateurs, qui se sont très sérieusement assignés la tâche d'œuvrer pour un monde meilleur. «On est une sorte de parc d'attraction pour informaticiens» ironise Urs Hölzle, membre de la direction. Le Googleplex, c'est un peu l'esprit Walt Disney à la sauce informatique et chacun suit le mouvement. A son bureau, on déploie sa panoplie de coussins, tasses, pin's aux couleurs de Google. Un employé sur deux porte un polo griffé maison et vit entouré de ballons géants et de grenouilles en peluche.

L'entrée en bourse du siècle

Aux Etats-Unis, le verbe «googler» est entré dans le langage courant comme synonyme de chercher. Il pourrait bientôt rimer avec fortune pour beaucoup d'employés qui seront millionnaires avant l'été. Car Google est un ovni, une start-up qui a réussi. En six ans, elle est passée de deux à mille employés. Elle est bénéficiaire depuis 2001 et ses ventes annuelles frisent le milliard de dollars. Généralement évaluée à 25 milliards de dollars, Google sera la plus grosse entrée en bourse de l'histoire d'internet. Du coup, les deux fondateurs, Larry Page et Sergey Brin, âgés de 31 et 30 ans, ont fait leur entrée dans le classement Forbes des milliardaires, au même rang que l'auteur d'Harry Potter.

Les recettes de Google

La technologie. C'est la force de Google. Son moteur de recherche retourne tout simplement les meilleurs résultats, en se basant sur des algorithmes élaborés par les fondateurs alors qu'ils étaient doctorants en informatique à Stanford, en 1998. Leur idée : plus il y a de liens vers un site, plus il est jugé populaire et donc classé en tête de liste.

Les cerveaux. C'est encore à Stanford que Google les recrute. «Vous cherchez un job cool ? Pas besoin de lettre d'accompagnement, un CV suffira» dit une petite annonce scotchée sur une poubelle à la sortie du bâtiment Bill Gates. Ici on croise les mêmes T-shirts Google. La légende du moteur de recherche est bien vivante et la quasi-totalité des doctorants sont engagés. Quant à ceux qui filent avec de bonnes idées en montant leur boîte, ils sont tout simplement rachetés par Google.

L'innovation. Pour rester numéro un, Google n'a pas d'autre choix que d'innover sans cesse. Ses dirigeants ont mis au point une implacable machine à idées. Au Googleplex, les employés travaillent un jour par semaine sur un projet personnel qu'ils choisissent totalement librement. L'accessit suprême, c'est d'être publié sur le site de Google. C'est ce qui est arrivé à Krishna Bharat, l'informaticien qui a mis au point le service d'actualités Google News dans son «temps libre rémunéré», avec deux autres collègues. Un service qui fait désormais partie du quotidien de millions d'internautes. Chez Google, pas de hiérarchie et un chaos encouragé par les dirigeants, pour «gagner en rapidité et laisser les gens expérimenter la technologie» souligne l'ancien vice-président de la recherche Urs Hölzle (voir interview).

La pub. Google a purement et simplement révolutionné la publicité online. Considérant la chose comme de la pollution indésirée, les fondateurs ont banni les bandeaux et pop-ups pour mettre au point un système de publicité à la fois plus discret et plus efficace. Les annonceurs achètent aux enchères des liens qui apparaissent en fonction du mot cherché par l'utilisateur. Tapez «job» et une liste de sites d'emploi apparait à droite des résultats.

Les Suisses de Google

Louis Perrochon est bernois, ingénieur, responsable de la qualité des développements mais «les titres n'ont aucune importance ici» précise-t-il. Ne parlons surtout pas de hiérarchie au Googleplex. Entre deux pas de danse, Louis a déjà goûté à sa minute de célébrité maison lorsque son projet personnel est publié sur google.com. Son idée : tapez le numéro d'un vol et le moteur de recherche vous renvoie l'itinéraire de l'avion et son retard éventuel à l'aéroport.

Le bureau d'à côté est occupé par Heike Schmitz. Cette informaticienne suisse diplômée de l'EPFZ est chef d'équipe. Son obsession : rendre l'interface de Google la plus limpide possible aux yeux des internautes. En avril 2001, la start-up californienne qui l'emploie est victime du crash internet. Elle rejoint alors Google et ses 180 employés.

Après l'EPFZ et Stanford, Urs Hölzle postule dans une start-up de six employés appelée Google. Cinq ans plus tard, ce zurichois est membre du directoire et proclamé «Super Googleur», son titre officiel. L'ancien vice-président de la recherche ne vient jamais au bureau sans son chien Yoshka. (voir interview)

La bourse ou l'empire

Bill Gates est fâché. Fin 2003, Google a refusé net son offre d'achat. Car la recherche sur internet, c'est sa nouvelle priorité. Il l'a dit tout net au dernier Forum de Davos : «Google nous a botté les fesses, mais on les aura». La dernière fois que Bill a piqué une grosse colère, c'est quand il a réalisé que Microsoft avait raté le train d'internet et qu'il a engagé sa croisade contre Netscape. De quoi avoir quelques sueurs froides chez Google, d'autant plus que Microsoft pourrait intégrer son moteur de recherche directement dans son système d'exploitation. Pourquoi ouvrir Google si on peut tout faire depuis «Word» ?

Googlemusik d'avenir

Google a réussi l'impossible : perpétuer les idéaux les plus farfelus de la bulle internet, rentabilité en plus, grosse tête en moins. Ils n'ont pas cédé à Bill. Ils n'ont pas perdu la boule quand on les arrosait de 25 millions de dollars de capital-risque pour monter leur boîte en 1998, en plein boom internet. Ils sont devenus numéro un par le bouche-à-oreille, sans dépenser un centime de publicité. Ils vont secouer Wall Street en mettant leurs actions aux enchères. Google est un extra-terrestre. D'ailleurs, ils recrutent pour la lune. 

Carine Jaggi pour la TSR

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